Le gamin qui changea à tout jamais ma façon de voir Noël

 

― Par John London

 

Je me précipitai au supermarché pour acheter quelques cadeaux de dernière minute. En voyant la cohue, je me mis à ronchonner. Cette petite course allait me prendre une éternité, alors que j’avais une myriade de choses à faire. Décidemment, Noël commençait à me peser. Si seulement je pouvais m’endormir pour ne me réveiller qu’après les fêtes ! Décidant de me dépêcher, je me frayai un chemin jusqu’au rayon des jouets. À nouveau, je grognai à la vue des prix, qui étaient exorbitants. Mes petits enfants seraient-ils même intéressés à ce que j’allais leur acheter ?

Je me retrouvai dans l’allée des poupées. Du coin de l’œil, j’aperçus un gamin d’environ cinq ans qui tenait dans ses bras une adorable poupée. Il lui caressait les cheveux et la serrait doucement contre lui. Je ne pouvais détacher mon regard de ce petit bonhomme, me demandant à qui la poupée était destinée. Je le vis se tourner vers une dame :

― Ma tante, es-tu sûre que je n’ai pas assez de sous ?

― Tu sais bien que tu n’as pas assez d’argent pour acheter ça, lui répondit-elle avec une pointe d’impatience.

La tante lui ordonna de rester sur place pendant qu’elle finirait ses emplettes, l’affaire de quelques minutes. Elle quitta le rayon. Le petit garçon continuait de tenir la poupée.

Après quelques secondes d’hésitation, je lui demandai pour qui elle était.

― C’est la poupée que ma sœur voulait absolument pour Noël. Elle était sûre que le Père Noël la lui apporterait.

― Et je suis certain qu’il va le faire, ajoutai-je.

― Non, répondit-il. Le Père Noël ne peut pas aller là où elle se trouve maintenant… Il faut que je la donne à ma maman pour qu’elle lui amène.

― Où donc est ta sœur ? lui demandai-je.

Me regardant de ses yeux les plus tristes, il me confia :

― Elle est allée avec Jésus. Mon papa dit que Maman va devoir la rejoindre.

Mon cœur faillit s’arrêter de battre. Alors le gamin, relevant les yeux, ajouta :

― J’ai demandé à Papa que Maman ne parte pas tout de suite, mais qu’elle attende que je revienne du magasin.

Puis il me montra une photo de lui qui avait été prise à l’entrée de la galerie marchande.

― Je veux que Maman l’emmène avec elle pour qu’elle ne m’oublie jamais. J’aime beaucoup ma maman et j’aimerais tant qu’elle puisse rester, mais Papa dit qu’elle doit aller retrouver ma petite sœur.

Je constatai que l’enfant baissait la tête et que, tout d’un coup, il était devenu silencieux. Profitant de ses quelques instants d’inattention, je tirai une liasse de billets de mon portefeuille, puis lui proposai :

― Et si nous recomptions ton argent encore une fois, pour être sûrs ?

― Oh oui ! fit-il, en reprenant espoir.

Je pris son argent dans ma main ; discrètement, j’y ajoutai le mien, et nous nous mîmes à recompter. Bien entendu, il y avait plus qu’assez pour la poupée.

― Merci Jésus de m’avoir donné assez de sous, fit l’enfant. Je Lui ai demandé de me donner ce qu’il fallait pour acheter cette poupée, pour que Maman puisse l’amener à ma petite sœur, et Il a entendu ma prière. Je voulais aussi Lui demander assez d’argent pour acheter une rose blanche à Maman, mais j’ai oublié. Mais Il m’a donné assez de sous pour acheter les deux ! Maman adore les roses blanches.

Quelques minutes plus tard, la tante revint. Je m’éclipsai avec mon caddie. Pendant tout le reste des courses, je ne pus m’empêcher de penser à ce gamin. Lorsque je quittai le magasin, je n’étais plus le même.

Cela me rappelait étrangement un fait divers que j’avais lu dans le journal quelques jours plus tôt, et l’article me revenait sans cesse à l’esprit : un conducteur en état d’ivresse était entré en collision avec une autre voiture et avait tué une petite fille ; quant à la maman, elle était dans un état critique. La famille devait décider s’il fallait ou non la maintenir en vie artificiellement. Mais ce petit garçon n’avait probablement rien à voir avec cette histoire…

Deux jours plus tard, je lisais dans le journal que la famille avait décidé de mettre un terme aux efforts de réanimation, et que la jeune femme était décédée. Je ne pouvais oublier le gamin et je n’arrêtais pas de me demander s’il y avait un rapport entre les deux histoires. Un peu plus tard, ce même jour, n’y tenant plus, je sortis acheter un bouquet de roses blanches et me rendis à la chapelle ardente où reposait la dépouille de la jeune femme. Elle était allongée là, tenant en effet dans ses mains une jolie rose blanche, l’adorable poupée et la photo du petit garçon dans le magasin.

Après avoir déposé les roses, je sortis en pleurs, bouleversé par l’amour d’un enfant pour sa maman et sa petite sœur.

« On gagne sa vie grâce aux choses que l’on reçoit, mais c’est en donnant qu’on la réussit. »

(traduit de l’anglais par Berniris)

 

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